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L’énigme de la semaine : Un diagnostic sous X

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Post by tedles Mon 18 Apr - 23:21

L’énigme de la semaine : Un diagnostic sous X



Un homme de 60 ans est admis dans un hôpital de la province de Victoria en Australie pour un syndrome neurologique aigu associant diplopie et démarche ataxique. En dehors d’un léger retard intellectuel il n’y a pas d’antécédents personnels ou familiaux connus. Le scanner cérébral pratiqué en urgence révèle un infarctus cérébelleux gauche qui parait pouvoir expliquer les symptômes neurologiques récents.
Le bilan biologique standard met en évidence une polyglobulie avec un taux d’hémoglobine à 22 g/100 ml (pour une normale entre 13 et 17). Cette polyglobulie qui pourrait avoir favorisé l’accident vasculaire cérébral (AVC) récent est explorée. Le taux d’érythropoïétine est normal et la mutation JAK2 n’est pas mise en évidence mais un taux élevé de testostérone totale est retrouvé (29,1 nmol/L pour une normale inférieure à 25,Cool. La biopsie de moelle exclut une hémopathie maligne. Durant le temps de ces explorations le patient se plaint de douleurs abdominales qui seront spontanément résolutives.
Elles conduisent néanmoins à la pratique d’un scanner abdominal qui met en évidence une hypertrophie bilatérale des surrénales (cliché).
A ce stade, la reprise de l’interrogatoire et de l’examen clinique et un examen biologique vont permettre d’orienter vers un diagnostic unique.


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L’énigme de la semaine : Un diagnostic sous X  Empty Re: L’énigme de la semaine : Un diagnostic sous X

Post by tedles Wed 20 Apr - 20:25

Les praticiens de cet hôpital australien étaient confrontés au cas d’un homme de 60 ans, déficient intellectuel léger, victime d’un infarctus cérébelleux probablement favorisé par une polyglobulie. La seule anomalie biologique retrouvée dans le cadre du bilan de cette polyglobulie était une élévation de la testostérone totale. Parallèlement, un scanner demandé devant des douleurs abdominales (d’ailleurs autolimitées) mettait en évidence une hyperplasie bilatérale des surrénales.
De fait, c’est un examen réalisé systématiquement dans le cadre des recherches cytogénétiques pour une éventuelle hémopathie maligne qui va orienter vers le diagnostic. Le caryotype révèle en effet que cet homme de 60 ans est porteur d’une formule chromosomique XX. Devant ce tableau évocateur d’une hyperplasie bilatérale congénitale des surrénales (HCS), le patient est transféré en service d’endocrinologie.
L’examen clinique est alors enfin pratiqué de façon complète. Le patient ne mesure qu’un mètre quarante et présente une hyperpigmentation cutanée et une alopécie androgénique. L’examen génital révèle une ambiguïté sexuelle avec phallus de petite taille et fusion des grandes lèvres. Interrogé sur la cause d’une cicatrice sous ombilicale le malade se souvient d’une intervention dans la petite enfance (l’absence d’ovaires et d’utérus sur le scanner abdominal laisse penser qu’il s’agissait d’une hystérectomie avec ovariectomie bilatérale peut-être associées à la cure d’un hypospadias). On retrouve également à la reprise de l’interrogatoire la notion de traitement par glucocorticoïdes, interrompu à une date indéterminée.
Le bilan hormonal décèle un taux d’ ACTH très élevé (82,5 pmol/L pour une normale inférieure à 10,1) associé à une réponse subnormale au test au synacthène, à des taux élevés de 17- hydroxy-progestérone (66,9 nmol/L pour une normale inférieure à 5) et d’androsténedione (31,6 nmol/L pour une normale inférieure à 9,1). Le profil des stéroïdes urinaires du patient est en faveur d’un déficit en 21-hydroxylase à l’origine de cette hyperplasie congénitale des surrénales.
L’ensemble du tableau clinique pouvait donc s’expliquer par cette affection génétique à transmission autosomique récessive. La 21-hydroxylase est en effet une enzyme nécessaire à la synthèse du cortisol. En cas de déficit, les taux bas de cortisol stimulent la sécrétion d’ACTH (ce qui explique l’hyperpigmentation, l’hyperplasie des surrénales, les taux élevés de testostérone, la petite taille, la virilisation et l’ambiguïté des organes génitaux lorsque le génotype est féminin). Quant à la polyglobulie, responsable d’une hyperviscosité sanguine ayant favorisé un AVC, elle était, dans cette observation, provoquée par l’excès d’androgènes qui stimulent l’érythropoïèse.
Il s’agissait probablement ici d’une forme dite non classique d’HSC puisque il n’y avait pas de décompensation métabolique (associant notamment déshydratation, hyponatrémie, hyperkaliémie et acidose) mais essentiellement des signes en rapport avec l’hyperandrogénie chronique (ambiguïté sexuelle, petite taille).
Le traitement de ce patient a reposé sur des glucocorticoïdes (qui évitent les insuffisances surrénales aiguës et l’excès d’androgènes) et sur des saignées répétées. Pour l’équipe désormais en charge de ce patient, un apport de testostérone exogène sera peut être nécessaire pour maintenir la virilisation de ce sujet qui s’est toujours considéré comme un homme.
Rappelons que le dépistage du déficit en 21-hydroxylase est systématique à la naissance en France depuis1997 par la mesure du taux de 17-hydroxy-progestérone. Un tel tableau de HSC vieilli (et négligé !) devrait donc être tout à fait exceptionnel aujourd’hui.
Insistons pour finir sur deux errements dans la prise en charge de ce patient.
D’une part, compte tenu des antécédents de prise de glucocorticoïdes au long cours et de l’hystérectomie totale pratiquée dans l’enfance, il est certain que le diagnostic d’HSC avait été posé précédemment chez ce patient mais que, pour une raison quelconque, il a été perdu de vue tandis que son déficit intellectuel ne lui permettait pas de comprendre la nécessité d’un traitement au long cours. Un simple carnet de santé aurait suffi pour que les médecins l’ayant reçu en urgence fassent le diagnostic en quelques minutes.
D’autre part et surtout, lors de l’hospitalisation initiale de ce patient, des examens biologiques sophistiqués et des techniques d’imagerie ont précédé un examen clinique complet, qui doit bien sûr comprendre (surtout en cas de douleurs abdominales justifiant un scanner) un examen des organes génitaux ne serait-ce que pour vérifier les orifices herniaires
!
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