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STRESS ET COEUR

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Post by tedles Tue 17 May - 23:30

Etude de la relation entre l’existence d’un stress ou d’un syndrome
dépressif et les maladies cardiovasculaires
Dr Pierre LAURENT, cardiologue
Responsable médical du site e-Cardiologie

INTRODUCTION

Le stress fait partie intégrante de notre vie et de plus en plus de personnes en sont atteintes, de même que le syndrome dépressif.

Nous avions à ce sujet publier un document dans la revue "Pour la Science" en juillet 2003, intitulé "les émotions du cœur" dans lequel nous évoquions l’influence qu’il peut y avoir entre le ressenti de nos émotions et le système cardiovasculaire. Nous le savons bien, lorsque nous avons un stress nous ressentons l’accélération de notre fréquence cardiaque, notre pression artérielle s’élève ce qui peut entraîner l’apparition de maux de tête entre autres symptômes.

Il est donc indéniable qu’il existe une relation entre les émotions et le cœur. De même, l’existence d’un syndrome dépressif, de plus en plus souvent rencontré dans la population générale, peut s’accompagner de modifications de certains paramètres cardiovasculaires comme la fréquence cardiaque qui a tendance a moins varier dans la journée et peut rester élevée la nuit, ou encore la pression artérielle.

Ce sujet de la relation entre le stress, le syndrome dépressif et les maladies cardiovasculaires est passionnant et a intéressé de nombreux médecins comme en témoignent le nombre de publications scientifiques sur ce sujet. En effet, lorsqu nous interrogeons la base de données des publications médicales (le "medline"), concernant la période de 1964 à 2006, nous constatons que pas moins de 1829 articles en langue anglaises ont été publié dans des revues aussi prestigieuses que le "New England Journal of Medicine", ou encore le fameux "Lancet"!

L’intérêt de ce sujet repose pas tant sur la fréquence du syndrome dépressif ou du stress que de l’explication physiologique qui peut être apporter pour interpreter cette interrelation.
QU’EST-CE QUE L’EMOTION POUR LE PSYCHIATRE?


Une émotion peut se définir comme une disposition, un phénomème universel, commun, impalpable mais pourtant très évident. Cette émotion, qui peut se traduire par un émoi, une anxiété ou encore une angoisse, va mettre le sujet dans une situation d’anticipation péjorative, de désarroi et de lutte. Le corollaire de ces signes va malheureusement être, avec le temps, l’apparition d’une attente, d’une impuissance et d’un épuisement.

Cette émotion est difficile à approcher car il n’existe pas de mesure objective, toutes les gradations sont possibles et son contrôle est impossible.

L’émotion est un phénomène psychosomatique provoqué aussi bien par un phénomène objectif (péril) que par un phénomène subjectif (contrariété).

Certaines personnes n’ont pas les capacités d’exprimer leurs émotions de manière évidentes (comme pleurer par exemple), cette caractéristique étant dénomée "alexithymie" par les médecins psychiatres.

LA PERSONALITE DES PERSONNES AYANT DE L’HYPERTENSION ARTERIELLE

Les sujets présentant une hypertension artérielle, définie par une pression artérielle systolique supérieure à 140 mm de mercure et une pression artérielle diastolique supérieure à 90 mm de mercure, ont parfois un profil psychologique caractéristique :

Difficulté à extérioriser leur agressivité et à assumer les affrontements ouverts
Tendance à la répression des émotions
Déni du stress
Hyper investissement social
Net souci du conformisme
Inhibition sexuelle

LE PROFIL PSYCHOLOGIQUE DES PERSONNES POUVANT AVOIR UNE ATTEINTE DES ARTERES CORONAIRES

Ce profil est appelé le profil de "type A" qui est caractérisé par les éléments suivants :

stimulation par la compétition
avidité de performance
vifs et impatients
déni des difficultés
déni de la vulnérabilité organique
attitudes de surcompensation : combativité
De plus, ces sujets ont des personnalités caractérisées par une addiction au stress (addiction tabagique associée), et ont besoin du stress pour être performants. Une fabrication accrue de testostérone est observée chez ces patients.

Ce profil psychologique est responsable de l’augmentation des maladies des artères coronaires (infarctus du myocarde en particulier).

EXISTE-T-IL DES PROFILS PSYCHOLOGIQUES "PROTECTEURS" DE LA SURVENUE DE MALADIES CARDIOVASCULAIRES

La réponse est manifestement OUI car les psychiatres ont isolé un profil de "type C" dont les caractéristiques sont les suivantes :

Réfléchis,
Soumis
Conciliants,
Evitant activement les conflits
Ces personnes auraient une protection contre les maladies cardiaques mais en contre partie auraient un taux de d’affection proliférative (cancer) ou de maladie du système immunitaire plus important que les personnes qui n’ont pas ce type de personnalité.

LA DEPRESSION ET LES MALADIES CARDIOVASCULAIRES

La dépression est assez fréquente chez les personnes présentant une maladies cardiovasculaires, et elle est souvent sous-diagnostiquée et parfois sous-traitée du fait de la présence de la maladie cardiovasculaire qui est souvent considérée comme prioritaire.

Or, l’existence d’une dépression est très fréquente chez les personnes atteintes d’une maladie cardiovasculaire comme il est représenté dans le tableau ci-dessous:

Maladie cardiaque
Taux de dépression
Insuffisance cardiaque

37%

Infarctus du myocarde

32%

Atteinte des artères coronaires (angine de poitrine)

34%

EFFET DU STRESS

L’effet du stress sur le cœur et les vaisseaux est important : il peut être responsable de l’atteinte du muscle cardiaque (le myocarde) mais peut également provoquer la survenue d’arythmie.

- Effet du stress sur l’apparition d’une arythmie

Ainsi, certains auteurs ont pu mettre en évidence que le taux de survenue d’infarctus du myocarde est majoré de 35% en cas de survenue d’un tremblement de terre et que l’anxiété et la colère peuvent être responsable de l’apparition d’une arythmie de l’oreillette qui est appelée fibrillation auriculaire.


Dans une étude réalisée par le Docteur Mattiolo et ses collaborateurs (publiée dans une revue appélée "Europace" en 2005), il est très bien montré que les facteurs qui ont le plus d’influence sur la survenue de la fibrillation auriculaire sont le stress, la personnalité de "type A" et la consommation de café. En contre partie, la survenue d’une fibrillation auriculaire induite par l’un de ces facteurs peu plus facilement disparaître spontanément, au bout que quelques heures ou quelques jours contrairement à celle qui est favorisée par l’existence d’un surpoids par exemple.

- Effet du stress sur l’apparition d’une maladie des artères du cœur (les artères coronaires)

Une étude a été publiée dans le "Journal of Psychosomatic Research" en 2000 par le Dr Kubzansky et ses collaborateurs, mettant très bien en évidence le rôle délétère du stress sur l’apparition d’une maladie des artères du cœur. En fait, cette étude reprend la publication d’autres essais réalisés dans ce domaine, les principaux résultats étant exprimés dans le tableau ci-dessous :

Nombre d’études
Nombre de patients
Résultat
Colère
3

6729

Tous positifs

Anxiété
8

41516

Tous positifs

- Effet du stress sur l’apparition d’une hypertension artérielle

Les études ont clairement pu mettre en évidence un effet aigu du stress sur la pression artérielle qui s’élève et peut atteindre des valeurs très élevées.

Par contre, ces études n’ont pas permis d’impliquer le stress dans la genèse d’une hypertension artérielle chronique.
EFFET DE LA DEPRESSION SUR LES MALADIES CARDIOVASCULAIRES

- Sur la mortalité et l’apparition de maladie cardiovasculaire

De très nombreuses études médicales se sont attachées à analyser la relation entre la dépression et la survenue de maladie cardiovasculaire, le principal problème lors de la lecture ou de l’interprétation de ces essais étant que la dépression est souvent associée à l’existence de facteurs cardiovasculaires (comme la consommation de tabac par exemple) ou encore à des conditions de vie peu favorables, ce qui rend les résultats moins visibles.

Une étude réalisée par le Dr Lespérance publiée dans une importante revue de cardiologie en 2002 ("Circulation") a permis de montrer que les patients porteurs d’une maladie des artères du cœur (coronaropathie) et qui ont un syndrome dépressif présente un risque de mortalité et de morbidité (possibilité de voir survenir une maladie) cardiovasculaire plus importante par rapport aux patients qui n’ont pas de syndrome dépressif. De plus, ces résultats sont proportionnels à l’intensité du syndrome dépressif. Ainsi, la morbi-mortalité cardiovasculaire est de 5% à 5 ans pour des patients ayant une maladie des artères coronaires et un syndrome dépressif de faible intensité, alors qu’elle est de 25% pour les patients présentant une dépression grave.

Une étude publiée dans le "Lancet" en 1996 par le Dr Denollet montre même que l’existence d’un syndrome dépressif est aussi importante (voir plus!) que les paramètres cardiologiques en termes de mortalité totale (cardiovasculaire et autre) chez les patients porteurs d’une maladie des artères du cœur.

- Effet de la dépression sur l’impuissance sexuelle


L’existence d’un syndrome dépressif est fréquemment associé à l’existence, chez l’homme, à une impuissance sexuelle. La femme est également concernée par cette inhibition sexuelle se plaignant fréquemment d’un manque de plaisir sexuel.

Cette impuissance sexuelle va contribuer à pérenniser l’existence d’un syndrome dépressif qui a son tour a une influence négative sur le système cardiovasculaire. Les facteurs extérieurs jouent un rôle important dans la genèse de cette association morbide entre le syndrome dépressif, la dysfonction érectile et l’existence de maladies cardiovasculaires. Ces facteurs sont le mode de vie, la prise de médicaments, l’existence d’une maladie autre que cardiovasculaire, sans oublier l’importante composante psycho-sociale.

- Effet de la dépression sur la survenue d’arythmies cardiaque graves (de type "ventriculaire")

Une étude très intéressante publiée par le Dr Whang et ses collaborateurs en 2005 dans le « Journal of the American College of Cardiology » a permis de démontrer que les patients déprimés porteurs d’un défibrillateur automatique implantable mis en place pour la survenue d’arythmies cardiaque graves dans un contexte de maladie des artères du cœur, avaient tendance a recevoir plus de chocs électriques appropriés par rapport aux sujets n’étant pas déprimés.

Ceci signifie que les patients déprimés ont présenté plus d’arythmies graves que les patients non déprimés.

EFFET DES MALADIES CARDIOVASCULAIRES SUR L’APPARITION D’UNE DEPRESSION

De même qu’une dépression peut favoriser l’apparition de maladies cardiovasculaires, cette relation peut également se voir à l’envers. En effet, de nombreuses études ont clairement montré que la présence d’une maladie des artères du cœur pouvait favoriser l’apparition d’une dépression artérielle, dont la sévérité est proportionnelle à l’intensité de la maladie cardiaque.

De plus, les patients porteurs d’une maladie des artères du cœur et présentant une dépression auraient un moins bon pronostic cardiovasculaire que les personnes atteintes de la même maladie cardiaque mais qui n’ont pas de dépression.


Ces résultats sont néanmoins à considérer avec précaution du fait de la présence possible de biais liés à l’existence même de la dépression. Ainsi, l’équipe du Dr Stewart a démontré dans une étude publiée dans une revue appelée "l’European Heart Journal" en 2003 que si on considère l’ensembles des facteurs de risque cardiovasculaire et les conditions socio-économiques de vie, l’existence d’une dépression n’est plus un vrai "marqueur de risque" cardiovasculaire en ce qui concerne les décès cardiovasculaire et l’apparition d’un événement cardiovasculaire.

IMPACT DE LA DEPRESSION CHEZ LES SUJETS PRESENTANT UNE MALADIE CARDIOVASCULAIRE ET EFFET DU TRAITEMENT ANTI-DEPRESSEUR

L’existence d’une dépression est responsable des faits suivants :

Altération de la qualité de vie
Mauvaise observance aux traitements et non-respect des règles hygiéno-diététiques
Réduction de l’activité physique
Maintien des conduitesabusives (alcool, tabac…)

Dans ce contexte l’administration d’un traitement anti-dépresseur apparaît plus que souhaitable et permettrait ainsi :

- D’améliorer la prise en charge médicamenteuse de la maladie cardiaque en améliorant l’observance au traitement cardiovasculaire ;

- De favoriser la mise en place des règles d’hygiène (pratique d’une activité physique en particulier et lutte contre les facteurs de risque cardiovasculaires) et d’alimentation.

Ainsi, la prescription d’un traitement anti-dépresseur pourrait permettre dans ce contexte d’éviter l’apparition d’une maladie cardiovasculai
re.
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