La jeune femme au sandwich(cas clinique)
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La jeune femme au sandwich(cas clinique)
La jeune femme au sandwich
Céline DUPIN, Montréal.
Cette jeune femme de 25 ans se présente en janvier 2008 à la consultation de cardiologie de l’hôpital universitaire de Birmingham pour des malaises ayant débuté vers l’âge de 15 ans. En dehors de ces symptômes, la patiente n’a aucun antécédent médical particulier ni personnel, ni familial. Le seul médicament qu’elle prend régulièrement est la pilule contraceptive. Elle n’a jamais fumé, boit très peu (moins de 10 verres par semaine) et déclare ne pas consommer de drogues illicites.
Les malaises dont se plaint la patiente depuis maintenant 10 ans durent en général moins de 10 secondes et se manifestent le plus souvent, lors de certains repas, par une sensation lipothymique brutale parfois accompagnée de nausées. Dans certains cas, le malaise se conclut par une perte de connaissance brève sans mouvement évocateur d’une crise comitiale selon l’entourage. La fréquence des lipothymies est très variable pouvant aller jusqu’à plusieurs épisodes par semaine. L’examen cardiovasculaire retrouve une fréquence cardiaque de repos à 60/min, une pression artérielle à 116/70 mm Hg sans hypotension orthostatique.
Deux bilans étiologiques ont été pratiqués au cours de deux hospitalisations précédentes en 2001 et en 2007. L’ECG de surface était normal. Sur le plan biologique aucune anomalie n’a été retrouvée aux examens suivants : numération formule sanguine, screening biochimique standard, bilan thyroïdien, hypophysaire et surrénalien, glycémie à jeun, test de tolérance au glucose, recherche de multiples auto-anticorps, C-réactive protéine, dosages des immunoglobulines. Un enregistrement de l’ECG sur 24 heures, une mesure ambulatoire de la pression artérielle et un électro-encéphalogramme (EEG) ont été également pratiqués. Si les deux premiers examens se sont révélés sans particularité, l’EEG, sans mettre en évidence de signes comitiaux, a révélé sur le tracé ECG réalisé pendant l’examen une pause de 2,5 secondes.
Quel est votre diagnostic ?
REPONSE
Nos confrères du service de cardiologie de l’hôpital universitaire de Birmingham devaient donc déterminer la cause des malaises qui perturbaient depuis 10 ans la vie d’une jeune patiente de 25 ans. Le seul élément positif des deux bilans pratiqués en milieu hospitalier 6 ans et deux mois auparavant, était la découverte d’une pause cardiaque de 2,5 secondes sur un tracé EEG par ailleurs sans particularité.
Pour explorer ce trouble de conduction éventuel, un enregistrement continu en boucle de l’ECG sur une semaine (avec possibilité pour le patient d’obtenir un tracé d’une à deux minutes lors d’un malaise) a été demandé. Il a mis en évidence lors d’un malaise sans perte de connaissance un bloc auriculo-ventriculaire (BAV) complet durant 2,5 secondes. La reprise de l’interrogatoire a permis de rapporter ce BAV à une étiologie inhabituelle.
En effet la patiente avait remarqué que ses malaises survenaient préférentiellement lorsqu’elle mangeait des sandwichs ou qu’elle buvait des boissons glacées. Ceci l’avait d’ailleurs conduite à limiter ses apports caloriques et son index de masse corporel était à 17,9 kg/m2. CJ Boos et coll. ont alors organisé, au cours d’une nouvelle hospitalisation, un test de provocation d’un genre particulier. Ils ont proposé à la patiente de manger un sandwich alors qu’elle était sous monitoring continu de l’ECG. L’absorption du sandwich a déclenché un malaise identique aux précédents au cours duquel l’ECG a mis en évidence un BAV avec pause ventriculaire de plus de 2 secondes (figure en A).
Le diagnostic posé a été celui de syncope de la déglutition. Ce type de malaise est décrit depuis des décennies (et peut-être des siècles si l’on y rapporte une observation publiée par Thomas Spen en 1793). Il semble lié à une hyper-réflectivité vagale favorisée par des pathologies gastriques ou œsophagiennes comme une hernie hiatale ou une sténose œsophagienne. Dans le cas de cette patiente aucune anomalie gastro-œsophagienne n’a été mise en évidence.
Au cours de ces syncopes, divers troubles du rythme ou de la conduction ont été décrits, allant de la bradycardie sinusale ou de la pause sinusale aux passages en arythmie complète par fibrillation auriculaire en passant par les bradycardies extrêmes, les BAV ou les asystolies.
Le traitement pharmacologique de ces syncopes de la déglutition qui peuvent être invalidantes (comme dans le cas de cette malade) peut reposer sur des médicaments à visée sympathomimétiques mais leurs effets sont très inconstants. Si l’atropine en prémédication pour des explorations pouvant entraîner un malaise vagal peut être utile, la pose d’un stimulateur cardiaque sentinelle est le seul traitement à coup sûr efficace.
C’est le choix qu’on fait CJ Boos et coll. dans ce cas. Grâce à un stimulateur double chambre asservi au rythme, la patiente n’a plus présenté de malaises et peut désormais manger des sandwichs en toute quiétude (Figure en B).
En A avant traitement, BAV lors de l’absorption d’un sandwich. En B, après pose d’un stimulateur, déclenchement du pacemaker durant l’absorption d’un sandwich.
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Céline DUPIN, Montréal.
Cette jeune femme de 25 ans se présente en janvier 2008 à la consultation de cardiologie de l’hôpital universitaire de Birmingham pour des malaises ayant débuté vers l’âge de 15 ans. En dehors de ces symptômes, la patiente n’a aucun antécédent médical particulier ni personnel, ni familial. Le seul médicament qu’elle prend régulièrement est la pilule contraceptive. Elle n’a jamais fumé, boit très peu (moins de 10 verres par semaine) et déclare ne pas consommer de drogues illicites.
Les malaises dont se plaint la patiente depuis maintenant 10 ans durent en général moins de 10 secondes et se manifestent le plus souvent, lors de certains repas, par une sensation lipothymique brutale parfois accompagnée de nausées. Dans certains cas, le malaise se conclut par une perte de connaissance brève sans mouvement évocateur d’une crise comitiale selon l’entourage. La fréquence des lipothymies est très variable pouvant aller jusqu’à plusieurs épisodes par semaine. L’examen cardiovasculaire retrouve une fréquence cardiaque de repos à 60/min, une pression artérielle à 116/70 mm Hg sans hypotension orthostatique.
Deux bilans étiologiques ont été pratiqués au cours de deux hospitalisations précédentes en 2001 et en 2007. L’ECG de surface était normal. Sur le plan biologique aucune anomalie n’a été retrouvée aux examens suivants : numération formule sanguine, screening biochimique standard, bilan thyroïdien, hypophysaire et surrénalien, glycémie à jeun, test de tolérance au glucose, recherche de multiples auto-anticorps, C-réactive protéine, dosages des immunoglobulines. Un enregistrement de l’ECG sur 24 heures, une mesure ambulatoire de la pression artérielle et un électro-encéphalogramme (EEG) ont été également pratiqués. Si les deux premiers examens se sont révélés sans particularité, l’EEG, sans mettre en évidence de signes comitiaux, a révélé sur le tracé ECG réalisé pendant l’examen une pause de 2,5 secondes.
Quel est votre diagnostic ?
REPONSE
Nos confrères du service de cardiologie de l’hôpital universitaire de Birmingham devaient donc déterminer la cause des malaises qui perturbaient depuis 10 ans la vie d’une jeune patiente de 25 ans. Le seul élément positif des deux bilans pratiqués en milieu hospitalier 6 ans et deux mois auparavant, était la découverte d’une pause cardiaque de 2,5 secondes sur un tracé EEG par ailleurs sans particularité.
Pour explorer ce trouble de conduction éventuel, un enregistrement continu en boucle de l’ECG sur une semaine (avec possibilité pour le patient d’obtenir un tracé d’une à deux minutes lors d’un malaise) a été demandé. Il a mis en évidence lors d’un malaise sans perte de connaissance un bloc auriculo-ventriculaire (BAV) complet durant 2,5 secondes. La reprise de l’interrogatoire a permis de rapporter ce BAV à une étiologie inhabituelle.
En effet la patiente avait remarqué que ses malaises survenaient préférentiellement lorsqu’elle mangeait des sandwichs ou qu’elle buvait des boissons glacées. Ceci l’avait d’ailleurs conduite à limiter ses apports caloriques et son index de masse corporel était à 17,9 kg/m2. CJ Boos et coll. ont alors organisé, au cours d’une nouvelle hospitalisation, un test de provocation d’un genre particulier. Ils ont proposé à la patiente de manger un sandwich alors qu’elle était sous monitoring continu de l’ECG. L’absorption du sandwich a déclenché un malaise identique aux précédents au cours duquel l’ECG a mis en évidence un BAV avec pause ventriculaire de plus de 2 secondes (figure en A).
Le diagnostic posé a été celui de syncope de la déglutition. Ce type de malaise est décrit depuis des décennies (et peut-être des siècles si l’on y rapporte une observation publiée par Thomas Spen en 1793). Il semble lié à une hyper-réflectivité vagale favorisée par des pathologies gastriques ou œsophagiennes comme une hernie hiatale ou une sténose œsophagienne. Dans le cas de cette patiente aucune anomalie gastro-œsophagienne n’a été mise en évidence.
Au cours de ces syncopes, divers troubles du rythme ou de la conduction ont été décrits, allant de la bradycardie sinusale ou de la pause sinusale aux passages en arythmie complète par fibrillation auriculaire en passant par les bradycardies extrêmes, les BAV ou les asystolies.
Le traitement pharmacologique de ces syncopes de la déglutition qui peuvent être invalidantes (comme dans le cas de cette malade) peut reposer sur des médicaments à visée sympathomimétiques mais leurs effets sont très inconstants. Si l’atropine en prémédication pour des explorations pouvant entraîner un malaise vagal peut être utile, la pose d’un stimulateur cardiaque sentinelle est le seul traitement à coup sûr efficace.
C’est le choix qu’on fait CJ Boos et coll. dans ce cas. Grâce à un stimulateur double chambre asservi au rythme, la patiente n’a plus présenté de malaises et peut désormais manger des sandwichs en toute quiétude (Figure en B).
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tedles-
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Re: La jeune femme au sandwich(cas clinique)
merci je ne l'ai jamais entendu parler c nouveau pour moi
ismano- V.I.P
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Re: La jeune femme au sandwich(cas clinique)
Excellent partage,merci .
nour elhouda-
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