Zéro douleur chez le nouveau-né

Une équipe de l’unité 901 Inserm à Marseille, animée par Rustem Khazipov et Yehezkel Ben-Ari, a montré que l’ocytocine, hormone impliquée dans le déclenchement de l’accouchement, entraîne un effet antalgique important chez le nourrisson au moment de la naissance. Cela lui permet de résister aux douleurs liées à cet événement et notamment la pression exercée lors du passage par voie basse. Cet effet anesthésiant se prolonge quelques heures après l’accouchement puis disparaît rapidement.



Les douleurs subies par la mère au moment de l’accouchement sont l’objet de toutes les attentions. Mais qui se soucie des sensations ressenties par le nouveau né ? Pourtant, l’enfant est soumis à une pression très importante au moment du passage par voie basse qui peut durer plusieurs heures. En outre, l’utilisation occasionnelle de forceps est par exemple susceptible d’entraîner des douleurs supplémentaires. Cependant, les scientifiques avaient déjà constaté que les nourrissons naissent en fait résistants à la douleur. Cet effet persiste quelques heures puis disparaît rapidement au point qu’il est recommandé d’effectuer tous les examens ou prélèvements dans les 90 minutes qui suivent l’accouchement afin de limiter la douleur iatrogène. Cependant, ce mécanisme antalgique restait jusqu’à ce jour un mystère.

Effet antalgique de l’ocytocine

Une équipe de l’Inserm a été interpellée par une étude de 2008 montrant que les bébés nés par voie basse sont beaucoup plus résistants à la douleur que ceux nés par césarienne. Or, l’accouchement se caractérise par une libération massive d’ocytocine chez la mère qui stimule les contractions de l'utérus et accélère le travail. Ils se sont par conséquent intéressés de près à cette hormone. Pour tester ses effets éventuels sur la douleur, les chercheurs ont bloqué les récepteurs à ocytocine présents à la surface des neurones chez des rats au moment de leur naissance. Cela se fait aisément grâce à un médicament qui présente ce mode d’action et est utilisé en cas de menace d’accouchement prématuré chez la mère.

Ils ont constaté que ces rats étaient beaucoup plus sensibles à la douleur que leurs homologues non traités. Ce même médicament utilisé deux jours après la naissance n’avait en revanche plus aucun effet sur la douleur. Enfin, en injectant de l’ocytocine à des rongeurs âgés de quelques minutes ou de deux jours, ils ont observé une réduction de la sensation douloureuse chez tous les animaux.

Cette succession d’expériences a permis de prouver que l’ocytocine présentait des propriétés antalgiques et réduisait nettement la sensibilité des nourrissons au moment de l’accouchement et quelques heures après. Mais cet effet disparaît dans les deux jours suivant la naissance.

De la mère ou du fœtus ?

Forts de cette découverte, les chercheurs ont été plus loin et ont réussi à décrypter les mécanismes impliqués. Ils ont constaté que cette hormone réduisait massivement la concentration de chlore contenue dans certains neurones, provoquant une inhibition des voies qui transmettent la sensation douloureuse. En revanche, ils n’ont pas clarifié l’origine de ce pic d’ocytocine au moment de la naissance. Il pourrait provenir de la mère, qui en secrète en quantité, et être transmis à l’embryon ou être intégralement secrété par celui-ci.


"Les neurones du nouveau né chez l’homme sont suffisamment matures au moment de la naissance pour fournir l’ocytocine, estime Yehezkel Ben Ari, unité Inserm U901. Une chose est sûre, l’accouchement par voie basse déclenche un mécanisme qui permet d’activer des voies antalgiques et ce mécanisme est moins actif en cas de césarienne programmée par confort, en l’absence de contractions déclenchées par la libération d’ocytocine" conclut-il.

Source

Mazzuca et coll. “Newborn analgesia mediated by oxytocin during delivery”
Frontiers in Cellular Neuroscience April 2011, Volume 5, Article 3

Des informations très intéressantes,à chaque fois on apprend des nouvelles choses ,merci tedles .