Un rein contre la liberté
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Un rein contre la liberté
by tedles Wed 4 May - 23:09
Gladys et Jamie Scott pourrissent depuis 1993 derrière les barreaux pour un hold-up qu’elles n’auraient pas commis et qui n’a rapporté que… 11 francs. Elles se sont toutefois vu proposer un marché étonnant: elles pourront être libérées définitivement quand la plus jeune sœur, Gladys, aura officiellement accepté de donner un de ses reins à son aînée malade.
Leur mésaventure commence le 24 décembre 1993. Ce jour-là, les deux sœurs se rendent dans le centre-ville de Forest (Mississippi) pour y rencontrer trois amis noirs. Sur le chemin, elles voient avec stupeur leurs connaissances bondir hors d’une voiture et braquer des passants. Un braquage éclair qui ne rapporte que 11 dollars à ses auteurs.
Témoignages tardifs
Les cinq jeunes – Gladys a 19 ans à l’époque et Jamie 22 – sont rapidement arrêtés. Ne voulant pas être traitées de «balances», les deux sœurs Scott ne clament pas immédiatement leur innocence. Elles sont par ailleurs persuadées qu’elles ne courent qu’un risque mineur, soit quelques semaines de prison. Quand le procès se déroule, une année plus tard, c’est la stupéfaction: les sœurs écopent d’une double condamnation à perpétuité.
Ni la police, ni le procureur, ni le juge – un raciste notoire selon The Hudson Valley Press – n’ont tenu compte des témoignages tardifs de Gladys et Jamie, qui avaient fini par se résoudre à accuser leurs amis. Même leur propre avocat a donné l’air de se désintéresser du sort de ses clientes, la presse locale notant que le défenseur des Scott n’avait appelé aucun témoin à décharge à la barre.
«Avant le procès, les victimes du hold-up se sont rendues chez nos parents pour les faire chanter. Ils ont promis de renoncer à leur plainte – ce qui aurait entraîné la suppression des charges – en échange d’une grosse somme d’argent», a écrit Jamie sur un blog mis à sa disposition par la NAACP (Association nationale pour l’avancement des gens de couleur aux Etats-Unis). «Plus tard, en 1998, un des assaillants a écrit une lettre au juge, authentifiée par un juriste, pour dire que nous n’avions pas participé au vol», a-t-elle encore ajouté.
Mais cela n’a servi à rien. «La vie de deux jeunes Noires ne valait même pas 11 dollars», selon OpEdNews. Leurs enfants – Gladys avait une fille de 7 ans et était enceinte au moment du hold-up; Jamie avait trois enfants de 7, 3 et 1 an – ont ainsi grandi pratiquement sans connaître leurs mères respectives.
Fréquentes dialyses
Il a fallu que Jamie commence à souffrir d’une insuffisance rénale en prison pour que le sort des deux sœurs attire l’attention. Son cas nécessite des dialyses de plus en plus fréquentes depuis un an. Son état s’est même tellement détérioré ces derniers temps que sa sentence a été suspendue pour qu’elle puisse être hospitalisée hors du système carcéral. Selon les médecins, sa seule chance de survie est actuellement de recevoir un rein compatible. Gladys s’est naturellement portée volontaire, et le gouverneur de l’Etat, Haley Barbour, a accepté de suspendre également sa condamnation dès que l’opération aura débuté.
Des défenseurs des droits de l’homme ont exprimé leur étonnement qu’il ait fallu des circonstances aussi dramatiques pour libérer deux Américaines dont la condamnation était entourée d’autant de zones d’ombre. Maladroitement, un porte-parole du gouverneur a rétorqué que ce n’est pas son patron qui a imaginé ce marchandage. «Gladys voulait donner son rein à sa sœur, s’est-il défendu. Ce n’est pas nous qui lui avons proposé ce marché.»
Cela signifie-t-il que le gouverneur du Mississippi, qui est souvent considéré comme un candidat possible du Parti républicain pour l’élection présidentielle de 2012, trouvait juste que Gladys et Jamie Scott aient payé si cher pour un hold-up qui n’avait fait aucun blessé et qu’elles n’auraient même pas commis? On l’ignore. En annonçant sa décision de libérer les sœurs, le gouverneur a seulement évoqué le coût du traitement médical de Jamie pour l’Etat.
Laszlo Molnar
Leur mésaventure commence le 24 décembre 1993. Ce jour-là, les deux sœurs se rendent dans le centre-ville de Forest (Mississippi) pour y rencontrer trois amis noirs. Sur le chemin, elles voient avec stupeur leurs connaissances bondir hors d’une voiture et braquer des passants. Un braquage éclair qui ne rapporte que 11 dollars à ses auteurs.
Témoignages tardifs
Les cinq jeunes – Gladys a 19 ans à l’époque et Jamie 22 – sont rapidement arrêtés. Ne voulant pas être traitées de «balances», les deux sœurs Scott ne clament pas immédiatement leur innocence. Elles sont par ailleurs persuadées qu’elles ne courent qu’un risque mineur, soit quelques semaines de prison. Quand le procès se déroule, une année plus tard, c’est la stupéfaction: les sœurs écopent d’une double condamnation à perpétuité.
Ni la police, ni le procureur, ni le juge – un raciste notoire selon The Hudson Valley Press – n’ont tenu compte des témoignages tardifs de Gladys et Jamie, qui avaient fini par se résoudre à accuser leurs amis. Même leur propre avocat a donné l’air de se désintéresser du sort de ses clientes, la presse locale notant que le défenseur des Scott n’avait appelé aucun témoin à décharge à la barre.
«Avant le procès, les victimes du hold-up se sont rendues chez nos parents pour les faire chanter. Ils ont promis de renoncer à leur plainte – ce qui aurait entraîné la suppression des charges – en échange d’une grosse somme d’argent», a écrit Jamie sur un blog mis à sa disposition par la NAACP (Association nationale pour l’avancement des gens de couleur aux Etats-Unis). «Plus tard, en 1998, un des assaillants a écrit une lettre au juge, authentifiée par un juriste, pour dire que nous n’avions pas participé au vol», a-t-elle encore ajouté.
Mais cela n’a servi à rien. «La vie de deux jeunes Noires ne valait même pas 11 dollars», selon OpEdNews. Leurs enfants – Gladys avait une fille de 7 ans et était enceinte au moment du hold-up; Jamie avait trois enfants de 7, 3 et 1 an – ont ainsi grandi pratiquement sans connaître leurs mères respectives.
Fréquentes dialyses
Il a fallu que Jamie commence à souffrir d’une insuffisance rénale en prison pour que le sort des deux sœurs attire l’attention. Son cas nécessite des dialyses de plus en plus fréquentes depuis un an. Son état s’est même tellement détérioré ces derniers temps que sa sentence a été suspendue pour qu’elle puisse être hospitalisée hors du système carcéral. Selon les médecins, sa seule chance de survie est actuellement de recevoir un rein compatible. Gladys s’est naturellement portée volontaire, et le gouverneur de l’Etat, Haley Barbour, a accepté de suspendre également sa condamnation dès que l’opération aura débuté.
Des défenseurs des droits de l’homme ont exprimé leur étonnement qu’il ait fallu des circonstances aussi dramatiques pour libérer deux Américaines dont la condamnation était entourée d’autant de zones d’ombre. Maladroitement, un porte-parole du gouverneur a rétorqué que ce n’est pas son patron qui a imaginé ce marchandage. «Gladys voulait donner son rein à sa sœur, s’est-il défendu. Ce n’est pas nous qui lui avons proposé ce marché.»
Cela signifie-t-il que le gouverneur du Mississippi, qui est souvent considéré comme un candidat possible du Parti républicain pour l’élection présidentielle de 2012, trouvait juste que Gladys et Jamie Scott aient payé si cher pour un hold-up qui n’avait fait aucun blessé et qu’elles n’auraient même pas commis? On l’ignore. En annonçant sa décision de libérer les sœurs, le gouverneur a seulement évoqué le coût du traitement médical de Jamie pour l’Etat.
Laszlo Molnar
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